Footing Nocturne Réflexif

Depuis le confinement, et vu que les salles de sport étaient fermées, j'ai pris l'habitude de courir régulièrement dans les rues de ma ville. St Sébastien sur Loire est une ville résidentielle tranquille de la banlieue de Nantes. Toutes les rues se ressemblent, il n'y a que peu de points de repères, des baraques et des baraques à perte de vue. Tandis que les habitations défilent tout au long de ma course, la monotonie de l'activité aidant, de nombreuses réflexions se font jour dans mon esprit.

(Oui oui c'est bien moi 😂 Dessin réalisé par une amie lors d'une de nos parties de Gartic Phone, pour tromper la monotonie du confinement 👌)

J'ai toujours trouvé que les promenades de nuit, alors que les gens dorment paisiblement chez eux, avaient quelque chose d'irréel. Un monde endormi où à part quelques chats et autres livreurs deliveroo en vadrouille, on ne croise pas grand monde 😴 De par ma grande taille, je me livre facilement à la curiosité mal placée, jetant un œil aux jardins qui défilent. Ici un bel espace bien entretenu, d'une retraitée qui doit y passer ses journées, ici une allée mal gérée, bardée de mauvaises herbes et d'objets épars, de quelqu'un sans doute trop pris par son boulot ou sa famille. Là un mauvais goût certain, dans cet espace de dix mètres carrés où cohabitent une cohorte de Nains de Jardin. Ici encore un sol complètement artificialisé, béton ou pelouse synthétique, bonjour l'horreur!

Chacun son petit pré carré, son petit projet bien à soi. Est-ce cela, l'aboutissement de toute une vie? Acheter une baraque, obtenir son petit bout de terrain à soi? 😏 Et des baraques, des baraques à perte de vues, de nombreuses si semblables... Encore des projets immobiliers en construction.... Et ici ce terrain vague? Ah non, c'est encore des appartements en construction, partout partout... 😔 Deux garages au lieu d'un, histoire de ranger les deux voitures, alors que l'extérieur suffit pourtant tout autant, non? Des outils de jardinage en double, voire même en triple! Car avec deux binettes et trois brouettes on doit sans doute deux fois plus gérer son trente mètres carré de jardin, non?

Clarifions un peu mes positions personnelles : Etant Minimaliste, je suis très heureux d'être simple locataire là où je vis 😁 Quand je veux un peu d'espace vert, je vais au parc, ce qui me donne l'occasion de croiser nombre de gens différents, et de les observer tout autant dans leurs activités à eux. Voire même de faire de sympathiques rencontres. Là où si j'avais mon propre jardin, je serai tout seul avec mes plantations 😕 C'est toujours amusant en rendant visite à des amis s'étant installés à la campagne pour le côté naturel, et d'"avoir un beau jardin que l'on va pouvoir utiliser pour planter des trucs", de voir parfois à quel point celui-ci est en fait complètement délaissé. Il s'agissait peut-être d'une lubie personnelle au fond, d'un vague fantasme qu'ils nourrissaient avant de s'y installer? 😋

Au composteur collectif, hier, on m'a signalé qu'il existait des initiatives pour s'occuper d'un bout de jardin chez des personnes âgées. On plante chez eux, on récolte pour nous et pour eux, et un petit lien social se crée. Très belle solution! Les initiatives de jardin collectifs également, qui fleurissent un peu partout. Ainsi que les composteurs collectifs, que je citait plus haut, qui doivent absolument se généraliser afin d'alléger nos poubelles et mieux gérer nos déchets 💖

A-t-on vraiment besoin de tous avoir chacun notre petit pré carré? Qui aurait-il de si indécent de partager un peu plus cet espace? Si chacun avait son petit chez-soi ainsi, par pur égoïsme, la terre suffirait-elle pour l'espace ainsi couvert d'habitations bourgeoises? D'autres modes de vie sont-ils possibles? 

Tout ça me fait penser à ce bouquin de Robert Silverberg, "Les Monades urbaines". Une dystopie un peu moins connue que 1984, Le Meilleur des Mondes, ou Fahrenheit 451. Dans le roman, l'humanité vit dans de gigantesques tours-continents, où elle croit de façon exponentielle. Des tours de 3000 mètres de haut! (Le Burj Khalifa de Dubaï, c'est 828m 😲) A l'inverse de notre monde où on se soucie de plus en plus de la surpopulation, ici, au contraire, le dogme en place est "Faites le plus de gosses possibles!" 😂 Au pire, on construira de nouvelles tours! Rendu à 75 milliards d'individus (Nous on en est à quasiment 8 Milliards en 2020), le monde des Monades finira sans doute un jour par imploser comme il est sous-entendu à plusieurs reprises dans le roman. Même avec des perfectionnements technologiques et sociétaux, la croissance infinie est une illusion! Entre les gigantesques Monades, la surface terrestre a été aplanie, et est utilisée pour des plantations à perte de vue, afin de nourrir les habitants des tours. Cette organisation verticale entraîne tout un ensemble de règles sociales passionnantes, qui n'ont plus rien à voir avec le monde que nous connaissons (Ex : Tout le monde est censé avoir des relations sexuelles avec tout le monde, refuser une demande d'une autre personne, c'est très mal vu 😅 Le couple, la notion même de "possession" de l'autre, n'existe même plus. Idem bien sûr pour les logements, qui sont automatiquement attribués). 

Cet autre extrême est-il vraiment la solution? Personnellement, pour embrasser pleinement le modèle du tout-locatif qui se développe de plus en plus, je serai franchement intéressé par un système similaire pour les logements. Va-t-il se développer ainsi un système d'appartements louables à la volée, un peu comme Netflix? Que va-t-il se passer lorsque les baby-boomers aisés transmettront leur héritage, et que l'on se retrouvera avec un surplus d'habitations qui resteront vides? Si on regarde le Japon de nos jours et ses campagnes, où la population s'effondre, est-ce un aperçu de ce qui nous attend? 

Et est-ce vraiment un mal, si cet espace se retrouve alors colonisé de nouveau par des animaux sauvages, ravis de retrouver ainsi un espace à eux? 😀

Bon allez, trêve de réflexions, je retourne courir 😉

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